Bonjour à tous ! Ravis de vous retrouver pour cette nouvelle édition de notre newsletter.
Cette semaine, nous vous proposons une newsletter un peu inédite, inspirée par notre invité du jour, Laurent. Cela fait plusieurs mois que nous cherchons avec insistance une entreprise industrielle ayant mis en place des pratiques de management innovantes pour l’inviter dans le podcast.
En effet, lors des conférences que nous avons pu faire dans des grandes entreprises industrielles comme Egis Rail, Vinci ou encore Michelin, nous avons systématiquement été challengés sur la faisabilité des pratiques managériales innovantes que nous présentions dans l’industrie.
C’est vrai que l’on voit difficilement comment mettre en oeuvre le télétravail complet ou encore le feedback de la chaise chaude dans une usine qui fabrique des portes de voiture… 🤔
Mais, forts de ce constat, nous avons décidé de dédier cette newsletter à deux fleurons de l’industrie française, qui ont osé s’émanciper des schémas classiques de management, décentraliser le pouvoir décisionnaire et redonner du sens à des métiers physiques, souvent pénibles et épuisants.
Si le sujet vous intéresse, nous vous invitons à aller écouter le podcast de cette semaine, que nous avons enregistré avec Laurent Bizien, le Directeur Général de l’incroyable PME Angevine qui nous a tout simplement rendu amoureux des étiquettes et plaques métal 😍.
Lien de l’épisode ici !
FAVI : l’autogouvernance et le pouvoir aux opérateurs
FAVI est un fabricant et fournisseur de pièces techniques pour diverses industries, entre autres l'industrie automobile. En 1983, Jean-François Zobrist est nommé DG de l’entreprise : ancien parachutiste, franc-tireur charismatique, il révolutionne FAVI.
FAVI est désormais divisée en 13 mini-usines autonomes dédiées, pour la plupart à un client spécifique : Volvo, Renault, Audi, etc. À cela s’ajoute un petit nombre d’équipes en amont (fonderie, réparation des moules) et d’équipes de soutien (ingénierie, vente, etc). Un vrai écosystème de mini-startups internes !
Comment concrètement s’organisent-elles ? Prenons l’exemple du processus de vente pour bien comprendre l’organisation de FAVI.
Une fois par semaine, le commercial se réunit avec son équipe pour la tenir au courant des commandes reçues. Le planning est décidé immédiatement et l’équipe détermine la date d’expédition. Le commercial arrive parfois avec une mauvaise nouvelle : le concurrent chinois propose ce produit moitié prix. L’équipe prend dès lors à bras le corps le projet pour déterminer s’ils peuvent gagner du temps sur la ligne de production ou proposer une plus forte valeur ajoutée. Il n’y a ni objectifs, ni chefs, c’est inutile. Les ouvriers sont en contact direct avec les concurrents et les clients. Ils savent que leur emploi dépend de la qualité de leur travail et de leurs décisions. Ils sont fiers de ce qu’ils font, ressentent leur impact et savent s’organiser.
Les résultats ?
Ils sont incroyables. Tous les concurrents de FAVI se sont délocalisés en Chine pour bénéficier d’une main d’œuvre bon marché. FAVI est toutefois parvenue à conserver 50% de parts de marché. Sa qualité est légendaire, son respect des délais est un mythe dans le secteur. Quant à ses marges, elles sont si élevées qu’en dépit de la concurrence chinoise, les ouvriers touchent un 16ème ou même un 17ème mois grâce à la participation.
FAVI recrute par ailleurs en moins de deux mois sur chacun de ses postes, qu’il soit opérationnel ou support. Pas mal pour une PME industrielle picarde non ?
Apprentissage : les échelons hiérarchiques apportent aux grands groupes ordre et stabilité. Mais cette structure a beaucoup de mal à gérer la complexité, qui plus est dans le monde ultra connecté dans lequel on vit. Il est essentiel, dans l’industrie comme ailleurs, de passer à des schémas d’autorité distribuée.
Martin Technologies : le droit à l’erreur et la confiance, les maîtres mots d’une usine qui marche
Laurent Bizien, notre invité du jour est Directeur Général chez Martin technologies, une entreprise qui s’organise un peu comme FAVI. Ils s’en inspirent tous les jours d’ailleurs ! Ils ont dans ce sens créé 3 mini-usines, chacune dédiée à un marché cible (luxe, plastique ou métal) où les ouvriers sont en contact direct avec le client.
Dans le podcast, Laurent nous explique les principaux enjeux d’un tel modèle. Évidemment, si vous voulez en savoir plus on vous invite à aller écouter l’épisode en entier, c’est extrêmement riche et inspirant !
1) Comment impulser le changement ?
Tout d’abord, on impulse pas le changement en le criant sur tous les toits. Bien au contraire ! Laurent nous explique que la première étape est de gagner la confiance des équipes et de leur faire comprendre que le changement est nécessaire bien plus que téléguidé par la direction. Et dans ce cas, il faut agir.
Ensuite, il est nécessaire de travailler sur sa posture de manager : impulser une transformation, c’est se mettre en “danger, c’est sortir du confort, ne plus être omniscient et tout savoir, ne plus diriger mais déléguer. Bref ça ne s’improvise pas.
“Un manager qui n'a pas confiance en lui aura naturellement de grandes difficultés à déléguer car il aura besoin de contrôler pour se rassurer. Travailler sur sa confiance en soi, c'est travailler sur sa posture de manager vis à vis de son équipe.” Laurent Bizien
Apprentissage : Avant de travailler sur une lourde transformation organisationnelle et managériale, il est essentiel de travailler sur sa posture de manager, de gagner en confiance pour pouvoir mieux la donner et déléguer. Cette étape nécessite un accompagnement, une prise de conscience et un changement de mentalité : ne plus être manager omniscient, ce n’est pas perdre en statut, c’est au contraire se mettre à l’écoute, être un soutien.
2) Comment décider ?
Dans une telle structure, il est évidemment intéressant de se questionner sur la façon dont les collaborateurs décident. Auparavant réservé au manager, le choix est désormais entre les mains des opérateurs et ouvriers.
Prenons un exemple simple pour illustrer le processus de décision chez Martin Technologies :
Quand on a besoin d’une nouvelle machine, chaque ouvrier peut se proposer pour décider un achat. Il peut dresser une liste de spécifications et négocier avec les fournisseurs. Mais avant de prendre sa décision, il doit consulter les experts et les collègues qui en seront affectés de manière significative.
Avant d’acheter une nouvelle machine, le collaborateur ira certainement voir son collègue ingénieur à la R&D pour savoir si nos futurs produits imposeront des contraintes qu’il devrait prendre en compte. Ensuite, il ira trouver une personne support en finance qui l’aura aidé à vérifier ses calculs et l’aura conseillé sur le prix. Puis il sera allé voir une acheteuse expérimentée pour lui demander des conseils en négociation. Et enfin, il ira consulter ses collègues utilisateurs de la machine pour comprendre si elle répond à leurs besoins.
Apprentissage : Ce processus de décision est incroyablement efficace : en moins de 24 heures, des décisions stratégiques sont prises, qui ont de surcroît le soutien de l’ensemble de l’entreprise ! Plus la peine d’enchaîner les réunions interposées pour convaincre et redire 100 fois les mêmes choses.
3) Quel rôle pour un dirigeant dans tout ça ?
Laurent nous le dit et l’assume totalement. Un dirigeant dans ce type de structure a du temps. En effet il n’enchaîne pas les réunions toute la journée pour s’informer et prendre des décisions avisées. Ce sont les collaborateurs qui le font ! Non, il a du temps, à lui de bien s’en servir.
C’est ainsi que chaque jour, Laurent passe voir chacun des 100 collaborateurs de Martin Technologies, sonde les équipes, ressent les difficultés opérationnelles et partage les succès.
Il se décrit comme une vraie batterie et une ressource pour ses collaborateurs. Son rôle est de remettre les gens en mouvement quand ils ne vont pas bien, de comprendre les attentes de chacun, de mettre en relation les bonnes personnes pour solutionner leurs problèmes, de donner les clés aux équipes pour qu’elles innovent en permanence.
Enfin, Laurent nous parle de son rôle externe à l’entreprise qui lui prend de plus en plus de temps. Ne plus avoir à prendre des décisions et à passer sa vie en réunion lui permet d’être en lien constant avec ses clients et fournisseurs, d’apprendre à mieux les connaître, de partager avec d’autres entreprises leurs meilleures pratiques et de s’en inspirer.
Bref un quotidien modifié, où manager ne rime plus avec diriger mais bien déléguer, épauler et rayonner. Laurent est un dirigeant épanoui, qui ne passe pas sa journée à gérer des problèmes, mais qui, parce qu’il se fait confiance et donne sa confiance, permet à l’entreprise d’être agile, centrée sur le client et finalement beaucoup plus humaine.
Et voilà c’est terminé pour aujourd’hui ! On espère que comme nous, on vous aura donner une envie de bosser dans l’industrie !
Si vous connaissez quelqu’un à qui partager ce podcast ou bien cette newsletter, surtout faîtes-le, c’est la plus belle des récompenses pour nous ! 😍
En attendant, on vous dit à dans deux semaine pour un nouvel épisode du podcast, on vous promet un épisode riche d’inspirations qui va vous donner des ailes pour vos vacances ! ☀️
À très vite !