Bonjour à tous ! Nous espérons que vous allez bien et que vous profitez au maximum des quelques jours de soleil qui nous sont offerts !
De notre côté, ça y est, nous entamons notre dernière semaine de stage, qui signifie aussi notre dernière semaine en Belgique… Nous avons déjà le coeur lourd de quitter nos 8 colocataires avec qui nous avons passé des moments de folie ! Quand on vient dans le Nord, on braie deux fois : quand on arrive et quand on repart. Et bien on peut vous dire que ça se vérifie aussi avec la Belgique !
L’édition de cette semaine nous a été inspirée par nos problèmes du quotidien. Depuis des mois, Matthieu lutte avec sa banque (la Société Générale pour ne citer personne) pour recevoir sa carte bancaire, connaître la date de début du remboursement de son prêt étudiant, comprendre pourquoi chaque mois on lui facture 17,12 euros pour un service qu’il n’a jamais demandé. Il a donc récemment décidé d’ouvrir un compte dans une néo-banque bien connue : Revolut.
Ces néo-banques attirent de plus en plus de clients. Elles renforcent la satisfaction de ces derniers en proposant de nouvelles fonctionnalités, une transparence accrue sur les frais bancaires ainsi qu’une simplicité d’utilisation jamais vue auparavant. À l’opposé, les banques traditionnelles, créées il y a des décennies et n’ayant jamais su se réinventer, ont des Net Promoter Scores (NPS) ou indices de satisfaction client de plus en plus bas chaque année.
Au-delà de toute la technicité que représente la création et la gestion d’une banque, nous étions sûrs que certains facteurs managériaux accéléraient la déchéance des grandes banques traditionnelles : la bureaucratie, les multiples strates hiérarchiques, l’opacité dans la relation client, les normes, etc… Et nous avions raison ! Car durant notre tour du monde, nous avons rencontré une banque veille de 150 ans qui a su rester agile, se réinventer en misant sur une structure et un management totalement atypiques pour ce secteur. Mais alors comment ont-il fait ?
C’est tout l’objet de cette édition ! Bonne lecture !
The Branch is the Bank
Telle est la devise de la banque. Handelsbanken est en effet une des banques nordiques les plus puissantes et est composée de 880 branches réparties dans 24 pays. Mais alors qu’est-ce qu’une branche ? Et bien c’est tout simplement la petite agence du coin de la rue où vous allez rencontrer votre conseiller bancaire quand vous voulez renégocier votre prêt. La devise d’Handelsbanken prend tout son sens quand on sait que chaque branche fonctionne comme une mini-entreprise totalement indépendante.
Les branches sont localisées là où sont leurs clients, ce sont elles qui connaissent le mieux les objectifs et attentes de ces derniers. Les collaborateurs sur place sont (logiquement) considérés comme les plus qualifiés pour effectuer les décisions opérationnelles. La banque souhaite que ses clients aient pour interlocuteurs directs des véritables décisionnaires et non de simples exécutants, soumis aux directives de leurs managers.
Concrètement, une branche est constituée d’en moyenne 12 employés, ayant chacun une fonction précise : des postes classiques comme account manager, conseiller, chargé d’études marketing, mais surtout des postes habituellement centralisés au siège comme Analyste Crédit, Risk Officers ou encore chargé d’études économiques. Intéressant non ?
Quand on vous disait que ces branches fonctionnaient comme de véritables mini-entreprises, on ne vous mentait pas : Handelsbanken estime que tous ses employés devraient pouvoir comparer leur performance avec celle de leurs pairs. La banque a ainsi bannit les budgets car comme disait l’ancien PDG de la banque :
“A budget would either prove roughly right, and then it will be trite, or it will be disastrously wrong, in which case it will be dramatic. My conclusion is thus : Scrap it !”
Jan Wallander, ancien PDG de Handelsbanken
C’est ainsi qu’en l’absence de budget, la performance des branches est mesurée sur la base d’un ratio coûts/revenus (C/I ratio) qui sert de référence concurrentielle entre les différentes branches. Toutes les branches locales sont donc en compétition les unes avec les autres dans le cadre d’une ligue interne dont les résultats sont publiés chaque mois sur l’intranet.
En plus du C/I ratio, d’autres indicateurs permettent de comparer les différentes branches et d’assurer un développement sain : les tendances des volumes d’affaires, le nombre de clients et les notes d’Audit.
Cette “ligue interne” contribue à stimuler la performance, l’amélioration continue et la discussion entre les branches pour apprendre les unes des autres. D’ailleurs chaque branche rencontre chaque mois une autre branche de leur région afin d’échanger sur ses meilleures pratiques et sa façon d’appréhender l’avenir. Toutes les branches aspirent à avoir une bonne place dans cette ligue, et c’est pourquoi elles cherchent à continuellement s’améliorer et performer. Cette organisation sous forme de mini-entreprises totalement indépendantes permet en premier lieu d’accroître la performance d’Handelsbanken mais surtout d’insuffler un sentiment d’appartenance et un engagement total de le part des collaborateurs dans leur travail !
La symétrie des attentions
Vous vous souvenez de notre édition sur Zappos ? Et bien chez Handelsbanken, ils ont la même conviction : c’est en prenant soin de ses employés que ces derniers vont prendre soin de leurs clients. Et prendre soin de ses clients, vous l’avez bien senti, c’est capital chez Handelsbanken !
Comme le dit le pape de l’innovation managériale Vineet Nayar, fondateur de HCL Technologies et auteur du livre Employees First, Customers Second :
La question est de savoir quelle est l’activité principale d’une entreprise ? La réponse est de créer une valeur différente et déterminante pour ses clients.
La deuxième question est dès lors Où cette valeur différente est-elle créée ? La réponse se trouve dans la relation que les employés nourrissent et entretiennent avec leurs clients.
Troisième question: Si l’avantage comparatif et la valeur d’une entreprise se crée via les employés, dès lors quelle doit-être la posture des dirigeants et de la direction ? La réponse à cette question est que le travail des managers devrait être d’enthousiasmer, d’encourager, de responsabiliser et de révéler chacun de leur collaborateurs afin qu’ils puissent créer cette valeur et ainsi rendre l’entreprise plus performante.
C’est là d’où vient le titre de mon livre : Employees First, Customers Second.
Mais alors concrètement, comment “prendre soin” de ses employés ?
Il faut connaître leurs attentes, leurs aspirations tant professionnelles que personnelles, leurs envies, les freins qui les empêchent de les réaliser, la façon dont ils conçoivent leur carrière, les enjeux auxquels ils font face, etc. C’est un boulot à plein temps ! Mais Handelsbanken est parvenue a mettre en place un système où on écoute ses employés, vraiment, pour les guider dans leur parcours.
Le recrutement à vie
Chez Handelsbanken, le recrutement s’envisage dans la durée, la très longue durée. En moyenne, les collaborateurs restent 23 ans dans l’entreprise. On sait pas vous, mais ça nous paraît looooong !
Pour fidéliser ses employés sur le très long terme, Handelsbanken a décidé de miser sur leur développement, la possibilité étant donnée à chaque employé de changer de métier et d’orientation au sein de la banque.
Kristiina, notre interlocutrice, nous raconte son histoire :
J’ai commencé ma carrière à 21 ans chez Handelsbanken, dans l’équipe en charge de l’asset management et de l’investissement. J’en ai vite eu marre, ça ne me convenait pas. Au lieu de changer de boîte, j’ai décidé d’en parler à mon boss, qui m’a tout de suite proposer de me former à la gestion de portefeuille, plus humain et plus proche de mes aspirations selon lui.
Ce qui est dingue, c’est que je n’ai rien eu à lui dire concernant ce que je voulais faire précisément, il savait ce que j’attendais de mon job parce qu’il me connaissait, tout simplement. J’ai donc appris la gestion de portefeuille en me formant auprès de l’équipe, au départ une demi-journée par semaine, puis deux jours par semaine, avant de l’intégrer définitivement.
Je suis restée 7 ans dans cette équipe, j’ai adoré mais j’avais besoin d’évoluer une nouvelle fois. J’en avais marre des chiffres, je voulais de l’humain. C’est d’ailleurs un de mes collègues qui m’a dit un matin que j’étais faite pour les Ressources Humaines et que je devrais tester. 2 mois après, j’étais dans l’équipe RH, et aujourd’hui, après 3 ans d’expérience (chose impossible dans un autre grand groupe), je suis DRH du groupe en Finlande.
L’histoire de Kristiina est loin d’être un cas isolé. Cette dernière nous dit-même que 5% des collaborateurs changent de métier par an, tout du moins dans la filiale Finlandaise. En tant que jeunes étudiants bientôt diplômés et n’ayant pas une idée précise de ce que nous voulons faire, on peut vous dire que ça fait rêver !
Recruter “à vie”, c’est selon Handelsbanken une très belle façon d’instaurer un sentiment de sécurité auprès de ses employés. Ils savent qu’ils ne seront pas virés à la moindre erreur, ce qui les encourage donc à tester, itérer et expérimenter de nouvelles choses. C’est aussi un moyen de retenir les talents, de leur proposer des parcours personnalisés, et non de coller au classique modèle de promotions hiérarchiques successives qui ne rime à rien. C’est enfin pour Handelsbanken, un merveilleux moyen de s’entourer de personnes qui connaissent tout de leur entreprise, qui connaissent différents départements et qui savent dès lors quels sont les enjeux de chacun. Cette organisation distille de la bienveillance, et ça fait du bien !
Zéro Bonus mais des employés tous actionnaires
C’est dans une logique de partenariat que la banque a mis en oeuvre un système tout à fait atypique ! Pour aller de pair avec la logique de responsabilisation des collaborateurs, la banque est persuadée que ces derniers doivent être des Owners.
Ils ont donc créé, depuis 1998, la fondation Oktogonen qui possède 10% des actions de l’entreprise. Chaque année une partie du profit généré par l’entreprise est dédiée à cette fondation où tous les employés sans exception ont une part égale. Cette part ne peut varier, mais le capital de chaque employé est accumulé en fonction des années d’expériences. Au moment de quitter l’entreprise, pour sa retraite ou non, l’employé empoche sa part.
Pour donner un ordre de grandeur, un employé, peu importe son niveau hiérarchique, ayant travaillé 30 ans chez Handelsbanken recevra l’équivalent d’un million d’euros pour partir à la retraite !! De quoi appréhender (très) sereinement l’avenir !
Ça marche vraiment ?
Et bien oui ! Tant d’un point de vue quantitatif que qualitatif !
Moody’s, la célèbre agence de notation bancaire classe Handelsbanken dans le top 10 des banques européennes les plus sûres, et ce depuis 10 ans. Depuis 47 ans, la banque dépasse très largement les profits réalisés par les autres banques traditionnelles. La banque surfe aussi sur des indicateurs de satisfaction client énormes en comparaison aux autres banques.
Comme le dit l’actuel PDG de la banque Anders Bouvin :
Le succès d’Handelsbanken s’explique par le fait qu’on ne succombe pas aux tendances passagères du milieu bancaire. Les valeurs fondamentales sont intemporelles. C’est pourquoi certaines entreprises sont en difficulté : ils inventent des stratégies pour le court terme.
Vous l’avez compris, cette banque traditionnelle de 150 ans a su rester agile tout au long de son existence. Le fondement de cette agilité perpétuelle tient dans l’autonomie et la confiance qui est accordée aux équipes opérationnelles. Chez Handelsbanken, pas de bureaucratie, pas de centralisation, ce qui ne veut pas dire pas de process et de structure. Chaque entreprise est tenue responsable de ses succès et de ses échecs. Les employés se sentent acteurs, ont un vrai impact et peuvent orienter la stratégie de l’entreprise à leur échelle.
Nous espérons que l'exemple d’Handelsbanken vous aura convaincu : on peut être agile même après 150 ans d’âge. On peut s’émanciper des pratiques habituelles d’une industrie et inventer sa propre façon de voir les choses. Il est nécessaire de faire confiance aux employés “du terrain”, qui connaissent le client et savent mieux que quiconque interagir avec lui. Il est nécessaire de décentraliser le pouvoir et de responsabiliser ses équipes, qui plus est dans une industrie complexe où les normes sont nombreuses comme le secteur bancaire.
Et il est surtout nécessaire de se réinventer perpétuellement, d’assumer ses choix et ses convictions pour créer des entreprises fortes, résiliantes, engagées et engageantes, attractives et performantes !
On espère sincèrement que cette septième édition, plus technique vous aura plu. n’hésitez pas à nous dire si ces focus précis sur une entreprise en particulier vous intéresse !
Si vous pensez qu’un/une ami(e) dans le secteur bancaire pourrait être intéressé(e) par cet exemple, vous pouvez lui envoyer en cliquant juste ci-dessous :
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On vous souhaite une merveilleuse semaine à tous, et à la semaine prochaine ! ☀️